La Damnation de Faust

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Musique de Hector Berlioz

Livret de Berlioz, Gandonnire et de NŽrval

 

Premire Partie

 

Scne I

 

Plaines de Hongrie

Faust, seul, dans les champs au lever du soleil

 

FAUST

Le vieil hiver a fait place au printemps;

La nature s'est rajeunie;

Des cieux la coupole infinie

Laisse pleuvoir mille feux Žclatants.

Je sens glisser dans l'air la brise matinale;

De ma poitrine ardente un souffle pur s'exhale.

J'entends autour de moi le rŽveil des oiseaux,

Le long bruissement des plantes et des eaux ...

Oh! qu'il est doux de vivre au fond des solitudes,

Loin de la lutte humaine et loin des multitudes!

 

Scne II

 

Ronde des paysans

 

CHÎUR

Les bergers laissent leurs troupeux;

Pour la fte ils se rendent beaux;

Fleurs des champs et rubans sont leur parure;

Sous les tilleuls, les voilˆ tous,

Dansant, sautant comme des fous.

Ha! ha! ha! ha! ha! ha! Landerida!

Suivez donc la mesure!

Ha! ha! ha! ha! ha! ha! Landerida!

 

FAUST

Quels sont ces cris? quel est ce bruit lointain?

 

CHÎUR

Tra la la la la la! ha ha!

 

FAUST

Ce sont des villageois, au lever du matin,

Qui dansent en chantant sur la verte pelouse.

De leurs plaisirs ma misre est jalouse.

 

CHÎUR

Ils passent tous comme l'Žclair,

Et les robes volaient en l'air;

Mais bient™t on fut moins agile;

Le rouge leur montait au front;

Et l'un sur l'autre dans le rond,

Ha! ha! ha! ha! ha! ha! Landerida!

Tous tombaient ˆ la fidle.

Ha! ha! ha! ha! ha! ha! Landerida!

Ne me touchez donc pas ainsi!

Paix! ma femme n'est point ici!

Profitons de la circonstance!

Dehors il l'emmena soudain,

Et tout pourtant allait son train,

Ha! ha! ha! ha! ha! ha! Landerida!

Tra la la la la la! ha ha!

 

Scne III

 

Une autre partie de la place

Une armŽe qui s'avance

 

FAUST

Mais d'un Žclat guerrier les campagnes se parent.

Ah! les fils du Danube aux combats se prŽparent!

Avec quel air fier et joyeux

Ils portent leur armure! et quel feu dans leurs yeux!

Tout cÏur frŽmit ˆ leur chant de victoire;

Le mien seul reste froid, insensible ˆ la gloire.

Marche hongroise

Les troupes passent. Faust s'Žloigne.

 

Deuxime Partie

 

Scne IV

 

Nord de l'Allemagne

Faust seul dans son cabinet de travail

 

FAUST

Sans regrets j'ai quittŽ les riantes campagnes

O m'a suivi l'ennui;

Sans plaisirs je revois nos altires montagnes;

Dans ma vielle citŽ je reviens avec lui.

Oh! je souffre! et la nuit sans Žtoiles,

Qui vient d'Žtendre au loin son silence et ses voiles,

Ajoute encore ˆ mes sombres douleurs.

ï terre! pour moi seul tu n'as donc pas de fleurs!

Par le monde, o trouver ce qui manque ˆ ma vie?

Je cherchais en vain, tout fuit mon ‰pre envie!

Allons, il faut finir! . . .

Mais je tremble . . . Pourquoi

Trembler devant l'ab”me entr'ouvert devant moi?

ï coupe trop longtemps ˆ mes dŽsirs ravie,

Viens, viens, noble cristal, verse le poison

Qui doit illuminer

Ou tuer ma raison.

(Il porte la coupe ˆ ses lvres. Sons des cloches.

Chants religieux dans l'Žglise voisine.)

Chant de la Fte de P‰ques

 

CHÎUR

Christ vient de ressuciter!

 

FAUST

Qu'entends-je?

 

CHÎUR

Quittant du tombeau

Le sŽjour funeste,

Au parvis cŽleste

Il monte plus beau.

Vers le gloires immortelles

Tandis qu'il s'Žlance ˆ grands pas.

Ses disciples fidles

Languissent ici-bas.

HŽlas! c'est ici qu'il nous laisse

Sous les traits bržlants du malheur.

ï divin ma”tre! ton bonheur

Est cause de notre tristesse.

ï divin ma”tre! tu nous laisses

Sous les traits bržlants du malheur.

 

FAUST

ï souvenirs!

ï mon ‰me tremblante!

Sur l'aile de ces chants vas-tu voler aux cieux!

La foi chancelante

Revient, me ramenant la paix des jours pieux,

Mon heureuse enfance,

La douceur de prier,

La pure jouissante

D'errer et de rver

Par les vertes prairies,

Aux clartŽs infinies

D'un soleil de printemps!

ï baiser de l'amour cŽleste

Qui remplissais mon cÏur de doux prŽsentiments

Et chassais tout dŽsir funeste!

 

CHÎUR

Christ vient de ressuciter! . . .

Mais croyons en sa parole Žternelle,

Nous le suivrons un jour

Au cŽleste sŽjour

O sa voix nous appelle.

Hosanna! Hosanna!

 

FAUST

HŽlas! doux chants du ciel, pourquoi dans sa poussire

RŽveiller le maudit!

Hymnes de la prire,

Pourquoi soudain venir Žbranler mon dessein?

Vos suaves accords rafra”chissent mon sein.

Chants plus doux que l'aurore

Retentissez encore,

Mes larmes ont coulŽ, le ciel m'a reconquis.

 

Scne V

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(apparaissant brusquement)

ï pure Žmotion!

Enfant du saint parvis!

Je t'admire, docteur!

Les pieuses volŽes

Des ces cloches d'argent

Ont charmŽ grandement

Tes oreilles troublŽes!

 

FAUST

Qui donc es-tu, toi dont l'ardent regard

PŽntre ainsi que l'Žclat d'un poignard,

Et qui, comme la flamme,

Bržle et dŽvore l'‰me?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Vraiment pour un docteur, la demande est frivole!

Je suis l'esprit de vie, et c'est moi qui console.

Je te donnerai tout, le bonheur, le plaisir,

Tout ce que peut rver le plus ardent dŽsir!

 

FAUST

Eh bien! pauvre dŽmon, fais-moi voir tes merveilles.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Certes! j'enchanterai tes yeux et tes oreilles.

Au lieu de t'enfermer, triste comme le ver

Qui ronge tes bouquins,

Viens, suis-moi, change d'air.

 

FAUST

J'y consens.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Partons donc pour conna”tre la vie.

Et laisse le fatras de la philiosophie.

(Ils partent.)

 

Scne VI

 

La cave d'Auerbach ˆ Leipzig

 

BUVEURS

Ë boire encor!

Du vin

Du Rhin

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Voici, Faust, un sŽjour de la folle compagnie.

Ici vins et chansons rŽjoissent la vie.

ChÏur de buveurs

 

BUVEURS

Oh! qu'il fait bon quand le ciel tonne

Rester prs d'un bol enflammŽ,

Et se remplir comme une tonne

Dans un cabaret enfumŽ!

J'aime le vin et cette eau blonde

Qui fait oublier le chagrin.

Quand ma mre me mit au monde,

J'eus un ivrogne pour parrain.

Oh! qu'il fait bon quand le ciel tonne . . .

Qui sait quelque plaisante histoire?

En riant le vin est meilleur.

Ë toi, Brander! Il n'a plus de mŽmoire!

 

BRANDER

(ivre)

J'en sais une, et j'en suis l'auteur.

 

BUVEURS

Eh bien donc! vite!

 

BRANDER

Puis qu'on m'invite,

Je vais vous chanter de nouveau.

 

BUVEURS

Bravo! bravo!

Chanson de Brander

 

BRANDER

Certain rate, dans une cuisine

ƒtabli, comme un vrai frater,

S'y traiter si bien que sa mine

Ežt fait envie au gros Luther.

Mais un beau jour le pauvre diable,

EmpoisonnŽ, sauta dehors

Aussi triste, aussi misŽrable

Que s'il ežt eu l'amour au corps.

 

BUVEURS

Que s'il ežt eu l'amour au corps.

 

BRANDER

Il courait devant et derrire;

Il grattait, renifflait, mordait,

Parcourait la maison entire;

La rage ˆ ses maux ajoutait,

Au point qu'a l'aspect du dŽlire

Qui consumait ses vains efforts,

Les mauvais plaisants pouvaient dire:

Ce rat a bien l'amour au corps

 

BUVEURS

Ce rat a bien l'amour au corps

 

BRANDER

Dans le fourneau le pauvre sire

Crut pourtant ses cacher trs bien;

Mais il se trompait, et le pire,

C'est qu'on l'y fut r™tir enfin.

La servante, mŽchante fille,

De son malheur rit bien alors!

Ah! disait-elle, comme il grille!

Il a vraiment l'amour au corps.

 

BUVEURS

Il a vraiment l'amour au corps.

Requiescat in pace. Amen.

 

BRANDER

Pour l'Amen une fugue! une fugue, un choral!

Improvisons un morceau magistral!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(bas ˆ Faust)

ƒcoute bien ceci! nous allons voir, Docteur,

La bestialitŽ dans toute sa candeur.

Fugue sur le thme de la Chanson de Brander

 

BRANDER ET BUVEURS

Amen.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Vrai dieu! messieurs, votre fugue est fort belle,

Et telle

Qu'ˆ l'entendre on se croit aux saints lieux.

Souffrez qu'on vous le dise:

Le style en est savant, vraiment religieux;

On ne saurait exprimer mieux

Les sentiments pieux

Qu'en terminant ses prires l'ƒglise

En un seul mot rŽsume.

Maintenant,

Puis-je ˆ mon tour riposter par un chant

Sur un sujet non moins touchant

Que le v™tre?

 

BUVEURS

Ah a! mais se moque-t-il de nous?

Quel est cet homme?

Oh! qu'il est p‰le et comme

Son poil est roux.

N'importe! Volontiers! Autre chanson! Ë vous!

Chanson de MŽphistophŽls

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Une puce gentille

Chez un prince logeait.

Comme sa propre fille,

Le brave homme l'aimait,

Et, l'histoire assure,

Ë son tailleur un jour

Lui fit prendre mesure

Pour un habit de cour.

L'insecte, plein de joie

Ds qu'il se vit parŽ

D'or, de velours, de soie,

Et de crois dŽcorŽ.

Fit venir de province

Ses frres et ses sÏurs

Qui, par ordre du prince,

Devinrent grands seigneurs.

Mais ce qui fut bien pire,

C'est que les gens de cour,

Sans en oser rien dire,

Se grattaient tout le jour.

Cruelle politique!

Ah! plaignons leur destin,

Et, ds qu'une nous pique,

Ecrasons-la soudain!

 

BUVEURS

Bravo! bravo! bravo! ha! ha!

Oui, Žcrasons-la soudain!

 

FAUST

Assez! fuyons ces lieux, o la parole est vile,

La joie ignoble et le geste brutal!

N'as-tu d'autres plaisirs, un sŽjour plus tranquille

Ë me donner, toi, mon guide infernal?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Ah! ceci te dŽpla”t? suis-moi!

(Ils partent.)

 

Scne VII

 

Bosquets et prairies du bord de l'Elbe

Air de MŽphistophŽls

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Voici des roses,

De cette nuit Žcloses.

Sur ce lit embaumŽ,

ï mon Faust bien-aimŽe,

RŽpose!

Dans un voluptueux sommeil

O glissera sur toi plus d'un baiser vermeil,

O des fleurs pour ta couche ouvriront leurs corolles,

Ton oreille entendra de divines paroles.

ƒcoute! Žcoute!

Les esprits de la terre et de l'air

Commencent pour ton rve un suave concert.

ChÏur de gnomes et de sylphes

Songe de Faust

 

GNOMES ET SYLPHES

Dors, dors, heureux Faust;

Bient™t, oui, bient™t, sous un voile

D'or et d'azur, heureux Faust,

Test yeux vont se fermer,

Au front des cieux va briller ton Žtoile,

Songes d'amour vont enfin te charmer.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Heureux Faust,

Bient™t, sous un voile

D'or et d'azur,

Tes yeux vont se fermer.

 

GNOMES ET SYLPHES

De sites ravissants

La campagne se couvre,

Et notre Ïil y dŽcouvre

Des fleurs, dcs bois, des champs,

Et d'Žpaisses feuillŽes,

O de tendres amants

Promnent leurs pensŽes.

 

FAUST

Ah! sur mes yeux dŽjˆ s'Žtend un voile.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Au front des cieux va briller ton Žtoile.

 

GNOMES ET SYLPHES

Mais plus loin sont couverts

Les longs rameaux des treilles

De bourgeons, pampres verts,

Et de grappes vermeilles.

Voici ces jeunes amants,

Le long de la vallŽe,

Voici ces jeunes amants

Oublier les instants

Sous la fra”che feuillŽe!

Une beautŽ les suit

IngŽnue et pensive;

Ë sa paupire luit

Une larme furtive.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Une beautŽ les suit.

Faust, elle t'aimera.

 

FAUST

(endormi)

Margarita!

 

MƒPHISTOPHƒLéS, GNOMES ET SYLPHES

Le lac Žtend ses flots ˆ l'entour des montagnes;

Dans les vertes campagnes

Il serpente en ruisseaux.

 

GNOMES ET SYLPHES

Lˆ, de chants d'alŽgresse

La rive rententit.

Ha!

D'autres chÏurs lˆ sans cesse

La danse nous ravit.

Les uns gaiement s'avancent

Autour des c™teaux verts!

Ha!

De plus hardis s'Žlancent

Au sein des flots amers.

 

FAUST

(rvant)

Margarita! ™ Margarita!

 

MƒPHISTOPHƒLéS, GNOMES ET SYLPHES

Le lac Žtend ses flots ˆ l'entour des montagnes;

Dans les vertes campagnes

Il serpente en ruisseaux.

 

GNOMES ET SYLPHES

Partout l'oiseau timide,

Cherchant l'ombre et le frais,

S'enfuit d'un vol rapide

Au milieu des marais.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Le charme opre; il est ˆ nous!

 

FAUST

Margarita!

 

GNOMES ET SYLPHES

Tous, pour gožter la vie,

Cherchant dans les cieux

Une Žtoile chŽrie

Qui s'alluma pour eux.

Dors, dors, heureux Faust, dors, dors!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

C'est bien, c'est bien, jeunes Esprits, je suis content de vous.

Bercez, bercez son sommeil enchantŽ.

Ballet des sylphes

(Les esprits de l'air se balancent quelque temps

en silence autour de Faust endormi et disparaissent peu ˆ peu.)

 

FAUST

(s'Žveillant en sursaut)

Margarita!

Qu'ai-je vu! qu'ai-je vu!

Quelle cŽleste image! quel ange

Au front mortel!

O le trouver? Vers quel autel

Tra”ner ˆ ses pieds ma louange!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Eh bien! il faut me suivre encor

Jusqu'ˆ cette alc™ve embaumŽe

O repose ta bien-aimŽe.

Ë toi seul ce divin trŽsor!

Des Žtudiants voici la joyeuse cohorte

Qui va passer devant sa porte;

Parmi ces jeunes fous, au bruit de leurs chansons,

Vers ta beautŽ nous parviendrons.

Mais contiens les transports et suis bien mes leons.

 

Scne VIII

 

Final: ChÏur d'Žtudiants et de soldats marchant vers la ville

 

ƒTUDIANTS ET SOLDATS

Villes entourŽes

De murs et remparts,

Fillettes sucrŽes,

Aux malins regards,

Victoire certaine

Prs de vous m'attend;

Si grande est la peine,

Le prix est plus grand.

Au son des trompettes,

Les braves soldats

S'Žlancent aux ftes

Ou bien aux combats;

Fillettes et villes

Font les difficiles;

Bient™t tout se rend.

Chanson d'Žtudiants

 

ƒTUDIANTS

Jam nox stella velamina pandit;

Nunc, nunc bibendum et amandum est!

Vita brevis fugaxque voluptas.

Gaudeamus igitur, gaudeamus!

Nobis subridente lun‰, per urbem qu¾rentes puellas eamus!

Ut cras, fortunati C¾sares, dicamus:

Veni, vidi, vici!

Gaudeamus igitur!

ChÏur de soldats et chanson des Žtudiants

 

ƒTUDIANTS ET SOLDATS

Villes entourŽes . . .

 

FAUST ET MƒPHISTOPHƒLéS

Jam nox stella . . .

 

Troisime Partie

 

Scne IX

 

(Tambours et trompettes sonnant la retraite)

Air de Faust

 

FAUST

(le soir dans la chambre de Marguerite)

Merci, doux crŽpuscule!

Oh! sois le bienvenu!

ƒclaire enfin ces lieux, sanctuaire inconnu,

O je sens ˆ mon front glisser comme un beau rve,

Comme le frais baiser d'un matin qui se lve.

C'est de l'amour, j'espre.

Oh! comme on sent ici

S'envoler le souci!

Que j'aime ce silence, et comme je respire

Un air pur! . . .

ï jeune fille!

ï ma charmante!

ï ma trop idŽale amante!

Quel sentiment j'Žprouve en ce moment fatal!

Que j'aime ˆ contempler ton chevet virginal!

Quel air pur je respire!

Seigneur! Seigneur!

Aprs ce long martyre,

Que de bonheur!

(Faust, marchant lentement, examine avec une curiositŽ passionnŽe

l'intŽrieur de la chambre de Marguerite.)

 

Scne X

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(accourant)

Je l'entends!

Sous ces rideaux de soie

Cache-toi.

FAUST

Dieu! mon cÏur se brise dans la joie!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Profite des instants.

Adieu, modre-toi,

Ou tu la perds.

(Il cache Faust sous les rideaux.)

Bien. Mes follets et moi

Nous allons vous chanter un bel Žpithalame.

(Il sort.)

 

FAUST

Oh! calme-toi, mon ‰me.

Scne XI

 

(Entre Marguerite une lampe ˆ la main. Faust cachŽ.)

 

MARGUERITE

Que l'air est Žtouffant!

J'ai peur comme une enfant.

C'est mon rve d'hier qui m'a toute troublŽe . . .

En songe je l'ai vu . . . lui . . . mon futur amant.

Qu'il Žtait beau!

Dieu! j'Žtais tant aimŽe!

Et combien je l'aimais!

Nous verrons-nous jamais

Dans cette vie? . . .

Folie!

Le roi de ThulŽ - Chanson gothique

 

MARGUERITE

(elle chante en tressant ses cheveux)

Autrefois un roi de ThulŽ,

Qui jusqu'au tombeau fut fidle,

Reut, ˆ la mort de sa belle,

Une coupe d'or ciselŽ.

Comme elle ne la quittant gure,

Dans les festins les plus joyeux,

Toujours une larme lŽgre

Ë sa vue humectait ses yeux.

Ce prince, ˆ la fin de sa vie,

Lge ses villes et sor or.

ExceptŽ la coupe chŽrie

Qu'ˆ la main il conserve encor.

Il fait, ˆ sa table royale,

Asseoir ses barons et ses pairs,

Au milieu de l'antique salle

D'un ch‰teau que baignaient les mers.

Le buveur se lve et s'avance

Auprs d'un vieux balcome dorŽ;

Il boit, et soudain sa main lance

Dans le flots le vase sacrŽ.

Le vase tombe: l'eau bouillonne,

Puis se calme aussit™t aprs.

Le vieillard p‰lit et frissonne:

Il ne boira plus dŽsormais.

 

Scne XII

 

ƒvocation

Une rue devant la maison de Marguerite

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Esprits des flammes inconstantes,

Accourez! j'ai besoin de vous.

Accourez! accourez!

Follets capricieux, vos lueurs malfaisantes

Vont charmer une enfant et l'amener ˆ nous.

Au nom du Diable, en danse!

Et vous, marquez bien la cadence,

MŽnŽtriers d'enfer, ou je vous Žtiens tous.

Menuet des follets

(Les follets exŽcutent des Žvolutions

et des danses bizarres autour de la maison de Marguerite.)

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(il fait les mouvements d'un homme qui joue de la vielle)

Maintenant,

Chantons ˆ cette belle une chanson morale,

Pour la perdre plus sžrement.

SŽrŽnade de MŽphistophŽls

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Devant la maison

De celui qui t'adore,

Petite Louison,

Que fais-tu ds l'aurore?

Au signal du plaisir,

Dans la chambre du drille,

Tu peux bien entrer fille,

Mais non fille en sortir.

Devant la maison . . .

 

MƒPHISTOPHƒLéS ET FOLLETS

Que fais-tu? Ha!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Il te tend les bras:

Prs de lui

Tu cours vite.

Bonne nuit, hŽlas!

Ma petite, bonne nuit.

Prs du moment fatal

Fais grande rŽsistance,

S'il ne t'offre d'avance

Un anneau conjugale.

 

MƒPHISTOPHƒLéS ET FOLLETS

Il te tend les bras . . .

Ha!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Chut! disparaissez!

(Les follets s'ab”ment.)

Silence!

Allons voir roucouler nos tourtereaux.

 

Scne XIII

 

Chambre de Marguerite

Final: Duo, Trio et ChÏur

 

MARGUERITE

(apercevant Faust)

Grand Dieu!

Que vois-je! . . . est-ce bien lui? dois-je croire mes yeux? . . .

 

FAUST

Ange adorŽ dont la cŽleste image

Avant de te conna”tre illuminait mon cÏur,

Enfin je t'aperois, et du jaloux nuage

Qui te cachait encor mon amour est vainqueur.

Marguerite, je t'aime!

 

MARGUERITE

Tu sais mon nom?

Moi-mme

J'ai souvent dit le tien:

(timidement)

Faust! . . .

 

FAUST

Ce nom est le mien;

Un autre le sera, s'il te pla”t davantage.

 

MARGUERITE

En songe, je t'ai vu tel que je revois.

 

FAUST

En songe! . . . tu m'as vu?

 

MARGUERITE

Je reconnais ta voix

Tes traits, ton doux langage . . .

FAUST

Et tu m'aimais?

 

MARGUERITE

Je t'attendais.

 

FAUST

Marguerite adorŽe!

 

MARGUERITE

Ma tendresse inspirŽe

ƒtait d'avance ˆ toi.

 

FAUST

Marguerite est ˆ moi.

 

MARGUERITE

Mon bien-aimŽ, ta noble et douce image,

Avant de te conna”tre, illuminait mon cÏur!

 

FAUST

Ah! Ange adorŽ, dont la cŽleste image,

Avant de te conna”tre, illuminait mon cÏur!

 

LES DEUX

Enfin je t'aperois, et du jaloux nuage

Qui te cachait encor ton/mon amour est vainqueur.

 

FAUST

Marguerite, ™ tendresse!

 

MARGUERITE

Je ne sais quelle ivresse

Dans ses bras me conduit.

 

FAUST

Cde ˆ l'ardente ivresse

Qui vers toi m'a conduit.

 

MARGUERITE

Bržlante enchanteresse

Dans tes bras me conduit.

Quelle langueur s'empare de mon tre!

 

FAUST

Au vrai bonheur dans mes bras tu vas na”tre,

Viens, viens, viens, viens . . .

MARGUERITE

Dans mes yeux des pleurs . . .

Tout s'efface . . .

Je meurs . . .

Tout s'efface . . . ah!

Je meurs . . .

 

Scne XIV

 

Trio et ChÏur

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(entrant brusquement)

Allons, il est trop tard!

 

MARGUERITE

Quel est cet homme?

 

FAUST

Un sot.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Un ami.

 

MARGUERITE

Son regard

Me dŽchire le cÏur.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Sans doute je dŽrange . . .

 

FAUST

Qui t'a permis d'entrer?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Il faut sauver cet ange!

DŽjˆ tous les voisins, ŽveillŽs par nos chants,

Accourent, dŽsignant la maison aux passants;

En raillant Marguerite, ils appellent sa mre.

La vieille va venir . . .

 

FAUST

Que faire?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Il faut partir!

 

FAUST

Damnation!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Vous vous verrez demain; la consolation

Est bien prs de la peine.

 

MARGUERITE

Oui, demain, bien-aimŽ.

Dans le chambre prochaine

DŽjˆ j'entends du bruit.

 

FAUST

Adieu donc, belle nuit

Ë peine commencŽe!

Adieu, festin d'amour

Que j'Žtais promis!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Partons, voilˆ le jour!

 

FAUST

Te reverrai-je encor,

Heure trop fugitive,

O mon ‰me au bonheur allait enfin s'ouvrir!

 

VOISINS

Holˆ! mre Oppenheim, vois ce que fait ta fille!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

La foule arrive,

H‰tons nous de partir!

 

VOISINS

L'avis n'est pas hors de saison;

Un galant est dans ta maison,

Et tu verras dans peu s'acco”tre ta famille.

Holˆ! holˆ!

 

MARGUERITE

Ciel! Ciel! entends-tu ces cris?

Devant Dieu, je suis morte

Si l'on te trouve ici!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Viens, on frappe ˆ la porte!

 

FAUST

O fureur!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

O sottise!

 

MARGUERITE

Adieu, adieu, par le jardin

Vous pouvez Žchapper.

 

FAUST

O mon ange! ˆ demain!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Ë demain! ˆ demain!

 

MARGUERITE

ï mon Faust!

Je te donne me vie.

L'amour s'est emparŽ de mon ‰me ravie,

Il m'entra”ne, te perdre, c'est mourir.

ï mon Faust bien aimŽ, je te donne ma vie,

ï mon Faust!

 

FAUST

Je connais donc enfin le prix de la vie,

Le bonheur m'appara”t, il m'appelle et je vais le saisir.

L'amour s'est emparŽ de mon ‰me ravie,

Il comblera bient™t mon dŽvorant dŽsir.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Je puis donc te tra”ner dans la vie,

Fier esprit!

Le moment approche o je vais te saisir.

Sans comble ton dŽvorant dŽsir,

L'amour en t'enivrant doublera ta folie.

Je puis donc ˆ mon grŽ te tra”ner dans la vie,

Fier esprit!

Le moment approche o je vais te saisir.

VOISINS

Un galant est dans ta maison . . .

 

Quatrime Partie

 

Scne XV

 

Chambre de Marguerite

Romance

 

MARGUERITE

D'amour l'ardente flamme,

Consume mes beaux jours.

Ah! la paix de mon ‰me

A donc fui pour toujours!

Son dŽpart, son absence

Sont pour moi le cercueil,

Et loin de sa prŽsence,

Tout me para”t en deuil.

Alors ma pauvre tte

Se dŽrange bient™t,

Mon faible cÏur s'arrte,

Puis se glace aussit™t.

Sa marche que j'admire,

Son port si gracieux,

Sa bouche au doux sourire,

Le charme de ses yeux,

Sa voix enchanteresse,

Dont il sait m'embr‰ser,

De sa main, la caresse,

HŽlas! et son baiser,

D'une amoureuse flamme,

Consument mes beux jours!

Ah! le paix de mon ‰me

A donc fui pour toujours!

Je suis ˆ ma fentre,

Ou dehors, tout le jour -

C'est pour le voir para”tre,

Ou h‰ter son retour.

Mon cÏur bat et se presse

Ds qu'il le sent venir,

Au grŽ de ma tendresse,

Puis-je le retenir!

O caresses de flamme!

Que je voudrais un jour

Voir s'exhaler mon ‰me

Dans ses baisers d'amour!

 

SOLDATS

Au son des trompettes,

Les braves soldats,

S'Žlancent aux ftes

Ou bien aux combats.

 

MARGUERITE

Bient™t la ville entire au repos va se rendre.

 

SOLDATS

Si grande est la peine,

Le prix est plus grand.

Clairons, tambours du soir dŽjˆ se font entendre

Avec des chants joyeux,

Comme au soir o l'amour offrit Faust ˆ mes yeux.

 

ƒTUDIANTS

Jam nox stellata velancina pandit;

Per urbem qu¾rentes puellas eamus!

 

MARGUERITE

Il ne vient pas,

HŽlas!

 

Scne XVI

 

Forts et cavernes

Invocation ˆ la nature

 

FAUST

Nature immense, impŽnŽtrable et fire,

Toi seule donne trve ˆ mon ennui sans fin.

Sur ton sein tout puissant je sens moins ma misre,

Je retrouve ma force, et crois vivre enfin.

Oui, soufflez, ouragans! Criez, forts profondes!

Croulez, rochers! Torrents, prŽcipitez vos ondes!

Ë vos bruits souverains ma voix aime ˆ s'unir.

Forts, rochers, torrents, je vous adore!

Mondes, qui scintillez,

Vers vous s'Žlance le dŽsir

D'un cÏur trop vaste et d'une ‰me alterŽe

D'un bonheur qui la fuit.

 

Scne XVII

 

RŽcitatif et chasse

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(gravissant les rochers)

Ë la vožtre azurŽe

Aperois-tu, dis-moi, l'astre de l'amour constant?

Son influence, ami, serait fort nŽcessaire,

Car tu rves ici, quand cette pauvre enfant,

Marguerite . . .

 

FAUST

Tais-toi!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Sans doute il faut me taire,

Tu n'aimes plus!

Pourtant en un cachot tra”nŽe,

Et pour un parricide ˆ la mort condamnŽe . . .

 

FAUST

Quoi!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

J'entends des chasseurs qui parcourent les bois.

 

FAUST

Achve, qu'as-tu dit?

Marguerite en prison?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Certaine liqueur brune, un innocent poison,

Qu'elle tenait de toi, pour endormir sa mre

Pendants vos nocturnes amours,

A causŽ tout le mal.

Caressant sa chimre,

T'attendant chaque soir, elle en usait toujours.

Elle en a tant usŽ que la vieille en est morte.

Tu comprends maintenant.

 

FAUST

Feux et tonnerre!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

En sorte

Que son amour pour toi la conduit . . .

 

FAUST

(avec fureur)

Sauve-la.

Sauve-la, misŽrable!

MƒPHISTOPHƒLéS

Ah! je suis le coupable!

On vous reconna”t lˆ,

Ridicules humains!

N'importe!

Je suis le ma”tre encor de t'ouvrir cette porte;

Mais qu'as-tu fais pour moi

Depuis que je te sers?

 

FAUST

Qu'exiges-tu?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

De toi?

Rien qu'un signature

Sur ce vieux parchemin.

Je sauve Marguerite ˆ l'instant, si tu jures

Et signes ton serment de me servir demain.

 

FAUST

Eh! que me fait

Demain, quand je souffre ˆ cette heure?

Donne.

(Il signe.)

Voilˆ mon nom.

Vers sa sombre demeure

Volons donc maintenant.

ï douleur insensŽe!

Marguerite, j'accours!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Ë moi, Vortex! Giaour!

Sur ces deux noirs chevaux,

prompts comme la pensŽe,

La justice est pressŽe.

(Ils partent.)

 

Scne XVIII

 

La course ˆ l'ab”me

Plaines, montagnes et vallŽes.

Faust et MŽphistophŽls galopant sur deux chevaux noirs.

 

FAUST

Dans mon cÏur retentit sa voix dŽsespŽrŽe . . .

ï pauvre abandonnŽe!

 

PAYSANS

(agenouillŽs devant une croix champtre)

Sancta Maria, ora pro nobis.

Sancta Magdalena, ora pro nobis.

 

FAUST

Prends garde ˆ ces enfants, ˆ ces femmes priant

Au pied de cette croix.

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Eh! qu'importe! en avant!

 

PAYSANS

Sancta Margarita . . .

(cri d'effroi)

Ah!!!

(Les femmes et les enfants se dispersent ŽpouvantŽs.)

 

FAUST

Dieux! un monstre hideux en hurlant nous poursuit!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Tu rves!

 

FAUST

Quel essaim de grands oiseaux de nuit!

Quels cris effreux! . . . il me frappent de l'aile!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(retenant son cheval)

Le glas des trŽpassŽs sonne dŽjˆ pour elle.

As-tu peur? retournons!

(Ils s'arrtent.)

 

FAUST

Non, je l'entends, courons!

(Les chevaux redouplent de vitesse.)

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(excitant son cheval)

Hop! hop! hop!

 

FAUST

Regarde, autour de nous, cette ligne infinie

De squelettes dansant!

Avec quel rire horrible ils saluent en passant!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Hop! pense ˆ sauver sa vie,

Et ris-toi des morts!

Hop! hop!

 

FAUST

(de plus en plus ŽpouvantŽ et haletant)

Nos chevaux frŽmissent,

Leurs crins se hŽrissent,

Ils brisent leurs mors!

Je vois onduler

Devant nous la terre;

J'entends le tonnere

Sous nos pieds rouler!

Il pleut du sang!!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

(d'une voix tonnante)

Cohortes infernales!

Sonnez, sonnez vos trompettes triomphales,

Il est ˆ nous!

(Ils tombent dans un gouffre.)

 

FAUST

Horreur! Ah!

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Je suis vainqueur!

 

Scne XIX

 

Pand¾monium

 

DAMNƒS ET DƒMONS

Ha! Irimiru Karabrao!

Has! Has! Has!

 

LES PRINCES DES TƒNéBRES

De cette ‰me si fire

Ë jamais es-tu ma”tre et vainqueur, MŽphisto?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

J'en suis ma”tre ˆ jamais.

 

LES PRINCES DES TƒNéBRES

Faust a donc librement

SignŽ l'acte fatale qui le livre ˆ nos flammes?

 

MƒPHISTOPHƒLéS

Il signa librement.

 

DAMNƒS ET DƒMONS

Has! Has!

(Les dŽmons portent MŽphistophŽls en triomphe.)

Tradioun Marexil fir TrudinxŽ burudixŽ!

Fory my Dinkorlitz.

O merikariu OmŽvixŽ merikariba.

O merikariu O midara

Caraibo lakinda, merondor Dinkorlitz,

merondor Dinkorlitz merondor.

Tradioun marexil,

Tradioun burudixŽ

TrudinxŽ Caraibo.

Fir omŽvixŽ merondor.

Mit aysko, merondor, mit aysko! Oh!

(Les dŽmons dansent autour de MŽphistophŽls.)

Diff! Diff! me rondor, me rondor aysko!

Has! Has! Satan.

Has! Has! BelphŽgor,

Has! Has! MŽphisto,

Has! Has! Kro•x

Diff! Diff! Astaroth,

Diff! Diff! BelzŽbuth, BelphŽger, Astaroth, MŽphisto!

Sat, sat ra yk Irkimour.

Has! Has! MŽphisto!

Has! Has! Irimiru Karabrao!

Epilogue

 

Sur la terre

 

DAMNƒS ET DƒMONS

Alors l'enfer se tut.

L'affreux bouillonnement de ces grands lacs de flammes,

Les grincements de dents et ses tourmenteurs d'‰mes,

Se firent seuls entendre; et, dans ses profondeurs,

Un mystre d'horreur s'accomplit.

ï terreurs!

Dans le ciel

 

ESPRITS CƒLESTES

Laus! Laus! Laus! Hosanna! Hosanna!

Elle a beaucoup aimŽ, Seigneur!

Margarita!!

ApothŽose de Marguerite

 

ESPRITS CƒLESTES

Remonte au ciel, ‰me na•ve

Que l'amour Žgara;

Viens revtir ta beautŽ primitive

Qu'une erreur altŽra.

Viens, les vierges divines,

Tes sÏurs les SŽraphimes,

Sauront tarir les pleurs

Que t'arrachent encor les terrestes douleurs

Conservent l'espŽrance

Et souris au bonheur.

Viens, Margarita, viens!