HANS HUBER





PRÄLUDIEN UND FUGEN
IN ALLEN TONARTEN FÜR PIANOFORTE
ZU VIER HÄNDEN op. 100

Sextet for Piano and Winds in B

A la mort de Hans Huber à Locamo le 25 décembre 1921, on était à la veille de commencer les préparatifs pour célébrer son 70e anniversaire et la Suisse perdait le spiritus rector de sa vie musicale et son compositeur le plus fêté.
Ses notices nécrologiques soulignent son œuvre comme compositeur, directeur de conservatoire et professeur, pianiste, chef d'orchestre, mentor de la vie musicale à Bâle et de l'Association Suisse des Compositeurs. Ses qualités humaines exceptionnelles lui attirèrent l'affection et le respect de tous: son humilité, son honnêteté, son intérêt pour tout ce qui est beau et noble - ainsi que sa jeunesse d'esprit, sa tolérance et son ouverture aux idées nouvelles - en firent un défenseur engagé de ses élèves et de tout ce qui lui avait été confié. Il ne répugnait jamais à s'attaquer avec assiduité à de nouvelles tâches pour l'enrichissement de la vie musicale en Suisse; il fut par exemple cofondateur et membre du conseil d'administration de l'Association des compositeurs et - un certain temps - il prit la direction du Gesangverein à Bâle après que la maladie eut forcé Alfred Volkland (1841-1905) à se retirer [Volkland avait fondé les concerts "Euterpe" à Leipzig avec Christian Sinding (1856-1941), pour faire une contrepartie moderne à la politique conservatrice des programmes du Gewandhaus, et il travailla comme chef d'orchestre à Bâle de 1876 à 1900.]
Huber se considérait comme un compositeur bourgeois et il allia la musique lourdement romantique en provenance surtout de l'Allemagne du nord avec la joie, l'animation et la sensibilité du sud. Via Schumann, Wagner et Brahms, il trouva son style propre qui avait certains points en commun avec ceux de Richard Strauss et Claude Debussy. Huber considérait Robert Schumann et son association de la musique avec l'art, la poésie et la nature - en fait le monde entier en général - comme son idéal. Dans une conversation avec son biographe Edgar Refardt en 1898, il décrivit le classicisme de Mendelssohn comme "un modèle, un exemple, le pain quotidien quoi" et il compara la musique de Schumann à des fruits sucrés. Hans Huber devint le plus important représentant de la musique suisse vers le tournant du siècle et son œuvre impressionnante inclut huit symphonies, des concertos pour piano et violon, cinq opéras, de la musique sacrée et de chambre, des œuvres chorales et de nombreuses chansons.
On cherchera en vain des effets académiques de construction: ce sont plutôt la poésie et le naturel spontané qui dominent dans la musique - des qualités qui dérangèrent les premiers critiques. La spontanéité souvent orageuse de ses sentiments était trop moderne pour les goûts conservateurs. Son intimité avec la Suisse, son amour du pays et de la nature sont décrits thématiquement dans par exemple les «Symphonies Tell», «Böcklin» et «Suisse» et «Ländler du lac de Lucerne». Huber fut un innovateur de première importance dans la musique et l'histoire de la musique de la Suisse qui, au cours du 19e siècle, avait surtout cultivé le chant pour voix d'homme. Il est plus facile de détecter un caractère typiquement suisse sur un niveau émotionnel que de le décrire en mots. Karl Nef parle de "résonance dans l'accord" relié à des allusions au chant alpin et au son des cors des Alpes ainsi qu'à leur emploi de motifs.
Une centaine de compositions d'Huber datent d'avant 1900. Dans une esquisse autobiographique de cette année, il exprima modestement le regret suivant: "Nous étions tous éparpillés dans le 'circulum' de Vienne, Bayreuth, Weimar et Leipzig. Suite à toutes ces... atmosphères variées, il est possible que mes premières œuvres aient un peu manqué de style... La chose terrible pour mon développement artistique futur... est que - pour gagner ma vie - j'ai dû laisser paraître trop tôt certaines œuvres qui manquaient d'autocritique. Mes culpa, mes culpa!... et je révèle ainsi du fond du cœur un désir qui est malheureusement utopique: de pouvoir tout recommencer et de faire mieux! Le compostteur soumit ses dernières œuvres, une vingtaine environ, à une autocritique considérablement plus sévère avant leur publication.
Le décès de Huber eut lieu au cours d'une période de grandes crises musicales qui enterrèrent plus d'une pièce de valeur et laissèrent sa musique ainsi que celle de plusieurs de ses contemporains être mise aux oubliettes comme passée de mode". Il cessa en peu de temps d'être l'un des compositeurs les plus souvent joués de la Suisse et il fut expulsé des programmes de concert par la montée rapide de l'impressionnisme et autres courants du début du 20e siècle - surtout par Richard Strauss qu'il admirait beaucoup.
Huber écrivit dans sa correspondance: "La création d'une œuvre d'art requiert plus de 'sentimento' que d'intellect. La vie est aussi une grande œuvre d'art. Si, pour cette raison, le 'sentimento' est plus marquant que l'intellect dans ma vie - m'en aimerez-vous moins?"
"L'art reste jeune à jamais et l'artiste fait de même."
En 1897, Bâle fêta le 70e anniversaire de son fils célèbre, le peintre Arnold Böcklin (né le 16 octobre 1827 à Bâle, mort le 16 janvier 1901 à San Domenico près de Fiesole) avec une exposition majeure, une médaille de Böcklin et le don de son nom à une rue. Le célèbre compositeur, pianiste, chef d'orchestre et directeur de conservatoire, le docteur Hans Huber - bien connu dans la ville pour «Musik zur Kleinbasler Gedenkfeier 1892» - participa à la grande fête du 23 octobre 1897 avec une œuvre solennelle basée sur les peintures de Böcklin («Der Heilige Hain, Sieh', es lacht die Au») qui incluait la marche des prêtres de «La Flûte enchantée» de Mozart et une composition de Böcklin lui-même. L'exposition renfermait 85 sujets dont les tableaux «Sieh, es lacht die Au», «Prometheus», «Liebesfrühling» et «Flötende Nymphe» en provenance de la collection du baron Maximilian von Heyl à Darmstadt. À cause je sa mauvaise santé, Böcklin vivait à Florence depuis 1892 et il envoya soif fils Carlo et son frère Werner le représenter aux réjouissances.
Max F. Schneider dit d'Arnold Böcklin qu'il était un peintre de l'esprit de la ruisique et il aimait particulièrement la musique de Beethoven, Schubert, Bach et Mozart; il demandait souvent à entendre leurs œuvres ou bien il jouait lui-même à l'harmonium, les larmes aux yeux, la «Danse des esprits bienheureux d'Orphée et Eurydice». Chopin et Wagner lui déplaisaient et il refusa même l'invitation de ce dernier à faire les décors de Parsifal à Bayreuth. Les tableaux de Böcklin sont à la source de plusieurs pièces de musique. En plus de Felix Weingarmer (1863-1921) qui écrivit un poème symphonique intitulé «Die Gefilde der Seligen» op. 21, d'autres compositeurs mirent en musique «Die Toteninsel», «Liebesfrühling», «Villa am Meer», «Der Heiligen Hain», «Der Eremit» et «Im Spiel der Wellen». Parmi les œuvres à être restées au répertoire se trouvent «Vier Tondichtungen nach Arnold Böcklin» op. 128 («Der geigende Eremit» / «Im Spiel der Wellen» / «Der Toteninsel» / «Bacchanal») de Max Reger et le poème symphonique L'lie des Morts op. 29 de Sergheï Rachmaninov.
Malheureusement, l'intérêt du publie pour les tableaux de Böcklin et de ses contemporains Lovis Corinth, Hans Thoma et Anselm Feuerbach, n'a pas été soutenu; les impressionnistes le leur ont ravi - ce fut aussi le destin des derniers compositeurs de musique romantique. On dirait que leur ère ne pouvait pas digérer l'exubérance de la fin de siècle.
La redécouverte générale de cette période est heureusement toujours en cours.

Hans Huber a remporté moins de succès dans le domaine de l'opéra qu'avec ses symphonies, musique de chambre ou pièces vocales - peut-être parce qu'il a préféré des textes peu dramatiques qui diminuèrent l'effet fait par ses œuvres de scène. Malgré cela, «Die schöne Bellinda» (terminé en 1916) et surtout «Der Simplicius» (qui sortit en 1899), un opéra en trois actes sur un livret d'Albrecht Mendelssohn-Bartholdy (une adaptation libre de Grimmelshausen) connurent des représentations splendides. Quand Huber composa «Simplicius», il avait fraîchement en mémoire les fêtes en l'honneur de Böcklin et le festival de Bâle. Les tambours, pipeaux et pas bruyants des guerriers résonnaient encore dans sa tète. Le prélude nous présente des rythmes captivants, une vie palpitante, le rentenfissement des trompettes solennelles, la mélodie langoureuse d'une chanson d'amour et une marche du bourreau. La pièce fut créée à Bâle le 5 novembre 1899 sous la direction du compositeur. L'opéra en entier fut monté pour la prernière fois à Bâle le 22 décembre 1912, après quoi il fut monté aussi à Berne et à Zurich. En compagnie de la «Symphonie no 2 en mi mineur» op. 115, le «Prélude symphonique» à l'opéra «Der Simplicius» («Symphonische Einleitung zur Oper "Der Simplicius"») fut joué au Festival de Musique Suisse au Gewandhaus de Leipzig le 16 septembre 1918.
Il ne reste qu'une pièce intitulée «Une ouverture comédie» («Eine Lustspiel-Ouvertüre») op. 50 de la musique de scène de Huber pour la pièce «Die Lotusblume» de Rudolf Kelterborn. C'est un prélude animé et léger qui ressemble un peu au «Matin» tiré de la musique de «Peer Gynt» d'Edvard Grieg (1843-1907).

Le père du compositeur, Johann Huber (1817-1902), fut d'abord professeur à Eppenberg sur Schönenwerd (entre Olten et Aarau); à partir de 1854, il travailla comme homme d'affaires et il dirigea le chœur paroissial de Schönenwerd.
Il était petit de taille, calme, sérieux à l'air doux et amical et au parler posé et réfléchi. La mère du compositeur, Marie (née Peyer, 1818-1904), était au contraire bien bâtie,vive et imposante, à la bouche et aux yeux séduisants. Le 28 juin 1852, le couple eut un fils, Johann, qui grandit dansle milieu retiré de sa ville avec son joli petit séminaire - où il devait aller vivre.
Après avoir reçu ses premières leçons de piano et de musique de son père, le jeune Johann de 17 ans devint l'élève d'Eduard Munzinger, le directeur du chœur d'Aarau et ensuite le directeur de la musique à Neuenburg. Trois ans plus tard, Huber entreprit des études au Choraulen- und Partisteninstitut de Solothurn, au séminaire de St-Urs. On y offrait des leçons de musique aux jeunes garçons de familles moins aisées - surtout en musique sacrée - jusqu'à la mue de leur voix. Les dix élèves devaient chanter trois fois par jour lois de services religieux. lis avaient leurs cours au séminaire; les leçons de piano se prenaient avec Cari Munzinger (qui devint ensuite directeur de la musique à Beme) qui leur donnait également les bases générales de la musique. Huber était un élève de piano enthousiaste et il joua bientôt la sonate «Pathétique» de Beethoven, les nouvelles «Variations de Paganini» de Brahms et la marche de «Tannhâuser» de Wagner dans un arrangement pour piano de Franz Liszt. À partir de la fin de cette époque au séminaire jusqu'à son examen final au lycée de Solothurn, Huber était déjà demandé comme organiste pour les services. Le père de Huber et l'évêque de Solothurn souhaitaient qu'il fasse des études de musique sacrée mais Johann désirait un cours artistique libre et, à la suggestion de Carl Munzinger, il se rendit à Leipzig en 1870 pour y étudier au conservatoire. Il y travailla le piano, le jeu d'ensemble, la composition et le chant choral avec Carl Reinecke (1824-1910, le directeur de l'institut et le chef des concerts du Gewandhaus), la théorie avec Ernst Friedrich Richter (1808-1879, organiste à l'église St-Thomas) ainsi que la théorie et l'histoire de la musique avec le docteur Oskar Paul (1836-1898, un philologue, théologien et pianiste). Les leçons de piano étaient données par Robert Papperitz et Ernst Ferdinand Wenzel [1808-1880, un élève inspiré de Friedrick Wieck (1785-1875, le père de Clara Schumann) et un grand adepte de la technique de piano de Liszt].

Alors qu'il était encore aux études, Huber - qui s'appela lui-même à partir de ce moment "Hans" - termina différentes compositions dont la plupart sont perdues, par exemple une «Symphonie en mi bémol majeur» inachevée. Sa «Sonate pour violon en si bémol majeur» fut jouée au Gewandbans le 15 mai 1872 et saluée unanimement par les professeurs. Il continua d'écrire de la musique de chambre et, en 1873, il termina «Konzertstück» pour piano et orchestre qu'il présenta aussi à son examen final le 19 mai 1874.
Au cours de ses études à Leipzig, Huber fit la connaissance de Clara Schuniann (1819-1896), Franz Liszt [1811-1886 lors d'un concert du «Requiem de Berlioz» (1803-1869) en mai 1872], Richard Wagner (1813-1883), Joseph Joachim Raff (1822-1882), Hans von Bülow (1830-1894 qui donna un récital de piano de musique de Mendelssohn) et Johannes Brahms (1833-1897 avec lequel il joua les «Danses hongroises» de ce dernier dans un arrangement pour deux pianos).
Malgré son attitude conservatrice de successeur de Félix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847) et Robert Schumann (1810-1856), Reinecke encourageait ses élèves au progrès et il était donc naturel que l'influence de Liszt et de Wagner prenne rapidement le dessus, C'est ce qui explique le jugement critique de Reinecke tu 1872: «...Huber n'a pas encore réussi à écrire une grande composition pleinement réussie, d'une part parce qu'il ne possède pas encore toute l'adresse technique exigée pour cela, et d'autre part parce qu'il a un penchant insurmontable pour le bizarre.» Avec ses camarades Hugo Riemann (1849-1919, qui devait devenir un musicologue réputé) et Otto Klauwell (1851-1917), Huber se trouvait continuellement tiraillé entre le conservatisme et le modernisme en musique.
Il remporta malgré tout de nombreux succès comme pianiste et chef d'orchestre. En 1872 déjà, il pouvait remplacer Reinecke comme pianiste aux soirées de musique de chambre, par exemple comme partenaire du chef de l'orchestre du Gewandhaus, Ferdinand David (1810-1873). L'année suivante, il fut invité à devenir le directeur de la musique à l'université de Marbourg mais il suivit le conseil de Reinecke et refusa. Il suivit aussi celui de Heuinch von Herzogenberg (1843-1900), le cofondareur de la Société Bach de Leipzig, et refusa également une invitation à Chicago. En février 1874, la direction du conservatoire lui confia la direction des concerts du vendredi et ce premier succès comme chef d'orchestre le remplit du désir d'aspirer à un poste semblable.
Une tendance qui se manifesta rapidement chez Huber est sa répugnance à écouter ses œuvres à plusieurs reprises. Quand le directeur du conservatoire de Cologne, Ferdinand Hiller (1811-1885) fit une visite à Leipzig en 1872, la «Sonate pour violon» de Huber devait être jouée mais le compositeur refusa «parce que je m'en suis fatigué et parce que je ne désire pas la servir à mes élèves une troisième fois.»
A la fin de ses études en 1874, Huber fut jugé par Reinecke comme l'un de ses élèves les plus assidus et Wentueux; Wenzel le décrivit comme «un pianiste qui est mùr sous tous les angles et qui a dépassé le conservatoire.»
Après avoir refusé des offres en provenance de Minden et de Saarbrücken, Huber se rendit en Alsace, à Wesserling et Thann où il accepta un poste d'organiste et professeur privé de musique et continua à composer. Son style était toujours dissident. Selmar Bagge, le directeur de l'Ecole de Musique de Bâle, rendit le verdict verbal suivant: «La laideur harmonique et le naturalisme sont prédominants: il est possible que M. Huber ait du talent - une prépondérance de dissonances»; d'autres admiraient «un coulant énergique, une exubérance, un sens bien développé de la sonorité et du vrai naturel - la musique est poétique, noble et profondément ressentie - intéressante, poignante même il ne manque pas d'aller son propre chemin.»
Après avoir joué «Konzertstück» op. 92 de Schumann à Bâle en novembre 1874, Huber se rendit dans cette ville en 1877 (malgré le préjugé évident de Bagge) parce qu'il y voyait plus de chances de développer son talent de compositeur. Il fut bientôt reçu à la résidence du directeur de la musique August Walter (1821-1896) et fut reconnu comme professeur de musique. Le 3 février 1878, Huber joua son propre Concerto pour piano no 1 en do mineur op. 36 lors d'un concert de l'Allgemeine MusikgeselJschaft dirigé par Alfred Volkland à Bâle et l'œuvre fut ensuite mise au programme du Conservatoire de Leipzig. Reinecke remercia de la dédicace des «Danses pour piano à quatre mains - Musique de ballet de Walpurgisnacht de Goethe» op. 23 et maintint un contact régulier à partir de 1883, souvent en lui rendant visite à Vitznau en été - parfois avec d'anciens élèves de Leipzig (Huber restait à Vitznau en été pour composer et se reposer de son enseignement). Le 3 novembre 1878, son Concerto pour violon en sol mineur op. 40 fut joué à Bâle avec Ernst Rentsch comme soliste. En 1880, Huber épousa Ida Petzold, la fille du directeur de la musique à Zofingen et une cantatrice respectée à Bâle.



Après la création de sa Symphonie no 1 («Symphonie Tell») en soi mineur op. 63 à Bâle le 26 avril 1881, Huber eut le grand honneur de présenter l'œuvre au Festival des Compositeurs Allemands à Zurich en 1882 (préparé avec excellence par Friedrich Regar); il reçut à cette occasion un éloge spécial du vieux Franz Liszt. Des demandes de nouvelles œuvres, en provenance de Leipzig, accrurent sa réputation.
Depuis son séjour à.Wesserling, Huber avait entretenu des contacts à Mulhouse et ces derniers se montrèrent particulièrement utiles au point de vue financier; son cercle d'élèves privés à Bâle grandit constamment. Il était donc impossible à l'école de musique de Bâle d'ignorer ce professeur populaire et, en 1889, on lui confia une classe avancée de piano qui s'élargit rapidement et qui forma la base du futur conservatoire. Il était une source individuelle d'inspiration pour ses élèves et il en faisait des musiciens à la personnalité développée. Son enseignement réfléchi était une garantie de justesse infaillible.
La popularité de Huber grandit en 1892 quand, sur une idée de Gottfried Keller, il composa «Schweizer Festspiel zur Kleinbasler Gedenkfeier» sur un texte de son ami, l'historien Rudolf Wackernagel. La manière doit il entraîna tout le monde présent en utilisant certaines inélodies populaires dans cette œuvre lui garantit un grand succès qui ne fit qu'accroître avec sa seconde œuvre dans ce genre «Festspiel 1901 zur Gedenkfeier des Eintritts Basels in den Schweizer Bund 1501» qui en fit pratiquement un héros populaire. Après le décès de Selmar Bagge le 16 juillet 1896, Huber fut suggéré comme «le successeur le plus idéal que l'on puisse imaginer» et, le 13 novembre, il devint le nouveau directeur. Sa nomination aimonça une grande période d'avancement pour l'institut qui eut un besoin constant d'agrandissement et de recrutement de professeurs hautement qualifiés; il devint ainsi un centre d'éducation très recherché et ce, non seulement pour les étudiants suisses. En tant que directeur, Huber essaya d'être présent à toutes les conférences et aux examens. En plus de ses succès particuliers comme professeur, Huber fit beaucoup pour stimuler la vie musicale à Bâle; sa chaude tolérance et son bon jugement l'y ont certainement aidé. Johannes Brahms et Ferruccio Busoni (1866-1924) se rendaient régulièrement à Bâle; Busoni donna de nombreux cours de maître et garda une correspondance soutenue avec Huber.
Le cercle des amis de Huber s'élargit continuellement Eugen d'Albert (1864-1932), Richard Strauss (1864-1949), Hans Pfitzner (1869-1949), Max Reger (1873-1916) et Henri Marteau (1874-1949) parlèrent de leurs propres œuvres et des siennes et Camille Saint-Saëns (1835-1921) le proposa comme Chevalier de la Légion d'Honneur en 1920. Il entretint une correspondance soutenue avec le peintre Hans Thoma, les écrivains Hermann Hesse, Heinrich Wölfflin,
Arnold Ott et Romain Rolland ainsi qu'avec ses amis, élèves et collègues de l'Association des Compositeurs.
Il quitta ses postes à Bâle suite à un sérieux diabète et passa ses responsabilités à son élève et ami Hermann Suter (1870-1926). Il se retira à Locarno pour se reposer et il composa surtout de la musique sacrée. Hans Huber mourut le 25 décembre 1921 suite à une pneumonie qui s'aggrava rapidement; il fut enterré à Vitznau.


SINFONIA N. 2 - Böcklin Symphonie


Il reste à découvrir le démodé Hans Huber, lui qui estimait beaucoup Böcklin et qui connaissait et admirait plusieurs de ses peintures. Il composa sa «Symphonie no 2 en mi mineur» op. 115 encore sous l'influence-des fêtes en l'honneur de Böcklin et de l'exposition de 1897. Destiné à un concert de la Basel Aligemeine Musikgesellschaft 20 mars 1898, la version originale portait le titre de «Sieh', es lacht die Au», une citation de la Musique pour le vendredi saint (acte, 3) de l'opéra «Parsifal» de Richard Wagner. (Parsifal à Kundry: "Auch deine Träne ward zum Segenstaue - du weinest, sieh, es lacht die Aue!")
Les mouvements portaient aussi des titres provenant de peintures: II. Frühlingserwachen / II. Der Reigen (une allusion à la musique préférée de Böcklin, «Danse des esprits bienheureux de Gluck») III. «Lenz und Liebe» / IV. Finale: Métamorphoses d'après des peintures de Böcklin.
Huber retira la symphonie après la première répétition et il la révisa. Le sous-titre général et le titre des mouvements furent omis et l'introduction lente du premier mouvement fut coupée. À l'exception de la section du milieu, le second mouvement fut entièrement recomposé. Les sections «Jagdzud der Diana», «Mélancholie» et «Der Heilige Hain» furent omises du finale (Huber composa un oratorio intitulé «Der Heilige Hain» en 1910).
La création de la symphonie à Zurich le 2 juin 1900 sous la direction du chef du Tonhalle, l'ami de Huber Friedrich Hegar (1841-1927), fut le sommet du premier Festival de Compositeurs Suisses. L'œuvre fut bientôt connue comme la «Symphonie de Böcklin». En Allemagne, Felix Weingartner à Munich et Arthur Nikisch avec l'Orchestre Philharmonique de Berlin en donnèrent des interprétations très saluées. Ces deux chefs, ainsi que Richard Strauss et Fritz Steinbach, veillèrent à ce que la symphonie soit entendue à plusieurs autres reprises.

Le premier mouvement commence avec les cors (chaque mouvement en fait) avec un fougueux motif de fanfare suivi du thème principal de la symphonie; entendu d'abord aux altos, ce thème se répand dans toute la symphonie comme un appel au cor des Alpes. On l'a désigné comme le "Motif de Böcklin".
Ce motif réapparaît, entremêlé à d'autres motifs et passe d'un instrument à l'autre de l'orchestre. Après un développement atmosphérique coloré, le mouvement glisse dans une douce coda. Un scherzo et trio, le second mouvement est une frénésie sauvage de bacchanale - une pièce dionysiaque sybarite dont la section médiane reprend le motif de Böcklin avec un caractère rude et rustique. Que l'indulgence de Böcklin pour les plaisirs de la vie et ses rencontres bien arrosées avec Gottfried Keller à Zurich aient été à la base de son inspiration pour ce mouvement est une question laissée à l'imagination de l'auditeur. Dans le troisième mouvement, la clarinette joue un hymne rêveur, une allusion à l'atmosphère de rédemption de la «Musique pour le vendredi saint». Dans le quatrième mouvement coloré, une introduction héroïque en canon précède l'apparition du
motif de Böcklin


au thème de la clarinette solo. On dirait que Böcklin visite tranquillement l'exposition de ses tableaux. Les métamorphoses, ou plutôt les variations de caractère, ne sont pas autant des descriptions du contenu des peintures que des réflexions sur la variation des perceptions de l'artiste face à elles. Sa marche de peinture à peinture, alternant entre des passages calmes et de plus agités, forme une intensification continuelle de la noirceur de «Meeresstille» au moyen de la valse rapide (Bacchanale) à la majestueuse apothéose finale. L'attitude héroique de Böcklin et de ses peintures est également nettement reflétée dans l'introduction des premier et quatrième mouvements.
Le soin ultérieur apporté par Huber à éviter le titre de "Symphonie de Böcklin" et sa préférence pour la considérer comme de la musique absolue se voient dans une objection apportée plus tard: "Symphonie d'après mi mineur, pas d'après Bocklin!"

Hans Huber a remporté moins de succès dans le domaine de l'opéra qu'avec ses symphonies, musique de chambre ou pièces vocales - peut-être parce qu'il a préféré des textes peu dramatiques qui diminuèrent l'effet fait par ses œuvres de scène. Malgré cela, Die schöne Bellinda (terminé en 1916) et surtout Der Simplicius (qui sortit en 1899), un opéra en trois actes sur un livret d'Albrecht Mendelssohn-Bartholdy (une adaptation libre de Grimmelshausen) connurent des représentations splendides. Quand Huber composa Simplicius, il avait fraîchement en meimoire les fêtes en l'honneur de Böckliri et le festival de Bâle. Les tambours, pipeaux et pas bruyants des guerriers résonnaient encore dans sa tête, Le prélude nous présente des rythmes captivants, une vie palpitante, le rententissement des trompettes solennelles. la mélodie langoureuse d'une chanson d'amour et une marche du bourreau. La pièce fut créée à Bâle le 5 novembre 1899 sous la direction du compositeur. L'opéra en entier fut monté pour la première fois à Bâle le 22 décembre 1912, après quoi il fut monté aussi à Berne et à Zurich. En compagnie de la Symphonie no. 2 en mi mineui op. 115, le Prélude symphonique à l'opéra «Der Simplicius» (Symphonische Einleitung zur Opei «Der Simplicius») fut joué au Festival de Musique Suisse au Gewandhaus de Leipzig le 16 septembre 1918.

Il ne reste qu'une pièce intitulée Une ouverture comédie (Eine Lustspiel-Ouvertüre) op. 50 de la musique de scène de Huber pour la pièce Die Lotusblume de Rudolf Kelterborn. C'est un prélude animé et léger qui ressemble un peu au Matin tiré de la musique de Peer Gynt d'Edvard Grieg (1843-1907).

Text extrait du booklet STERLING CDS-1022-2 © Hanjörg Lenger - Traduction française © Arlette Lemieux-Chené. Texte en allemand et en anglais dans le booklet.