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La pagina Web segnalata qui sopra contiene il programma con il minutaggio. Inoltre è trascritto l'ottimo testo inglese del booklet, redatto da Chris Walton. Nel booklet del CD vi è la traduzione francese e tedesca del testo.
CASA DISCOGRAFICA GUILD
CASA DISCOGRAFICA DIVOX
PHILIPP JARNACH (1892-1982): Das Amrumer Tagebuch for Piano, Op. 30, Sarabande, Op. 17/2 for Piano, Sonatine for Flute and Piano, Op. 12, Sonata for Violin Solo, Op. 13, 3 frühe französische Lieder, 4 Lieder für mittlere Singstimme, Op. 7, 5 Gesänge, Op. 15. Aside from his useful completion of Busoni's Doktor Faust, for which he is principally remembered today, Jarnach was in his own day an estimable composer and pianist in his own right. These songs and chamber and piano works display the talents of a composer unquestionably deeply influenced by the great Busoni, but also with an individual voice in which French elegance and sophistication and the Romantic German lied play an important part. There is little evidence of the serial preoccupations of the early-mid 20th century, and the music might even be described as backward-looking, although the best of it might be better seen as sideways-glancing - at Busoni - and it is all very finely wrought and seriously expressive. Those who admire Busoni should not hesitate to investigate this further evidence of his influence over one of his most talented disciples and collaborators. Martin A. Bruns (baritone), Heinrich Keller (flute), Kolja Lessing (violin, piano). Divox CDX-29801 (Switzerland) 12C065 $17.98

Dal booklet (francese, inglese, tedesco)
UNA INTRODUZIONE
alle opere registrate nel CD

Testo di Barbara Busch e Kolja Lessing
Traduction Elise Harrer

DREI FRÜHE FRANZÖSISCHE LIEDER

1. Ville morte

2. Arpège

3. La Forêt antique

SONATINE FÜR FLÖTE UND KLAVIER OP. 12

VIER LIEDER FÜR MITTLERE SINGSTIMME MIT KLAVIERBEGLEITUNG, OP. 7

SONATE FÜR VIOLINE OP. 13

FÜNF GESÄNGE OP. 15

DREI KLAVIERSTÜCKE OP. 17

Sarabande

DAS AMRUMER TAGEBUCH op. 30 FÜR KLAVIER SOLO

Hymnus

Elegie

Sturmregen

Jarnach réussit sa percée en tant que compositeur avec le “Quintette à cordes” op. 10 dédié à Busoni, qui écrivait à son sujet: “Cette oeuvre marque la fin de vos années d'apprentissage et laisse supposer que vous posséderez bientôt la pleine maîtrise de votre art.” Le “Quintette” fut créé en Allemagne en 1921 dans le cadre du premier festival de musique de Donaueschingen et assura à Jarnach une reconnaissance internationale en tant que compositeur. Des oeuvres ultérieures, telles la “Sonate für Violine solo” op. 13, les “Fünf Gesänge” op. 15 ou les “Drei Klavierstücke” op. 17, vinrent conforter cette renommée et concoururent à la nomination de Jarnach, alors âgé de 35 ans, à la Musikhochschule de Cologne. “Dans cette ville au bord du Rhin, mon rythme de vie se fit plus paisible. De ce fait, jamais je ne travailIai autant que durant cette période de mon existence. Mon activité en tant que pianiste concertiste se développa considérablement, j'eus aussi fréquemment la possibilité de diriger mes propres oeuvres; et je pris plus de plaisir encore à enseigner (la composition) à l'Académie de Cologne.”
Après 1927, deux compositions virent le jour, qui tiennent une place particulièrement importante dans l'histoire de la réception des œuvres musicales. Hermann Abendroth se vit confier la création de la “Musik mit Mozart”, une composition pour orchestre, que, par la suite, Wilhelm Furtwängler dirigea à son tour, à Berlin. En très peu de temps, l'oeuvre connut plus de cent représentations dans la seule Allernagne et contribua à étendre la réputation de Jarnach, comme devait aussi le faire plus tard “Amrumer Tagebuch” pour piano. Si la “Musik mit Mozart” avait empêché que l'art de Jarnach ne soit qualifié, durant l'époque du national-socialisme, d'art décadent - ce qui équivalait alors à un verdict sans appel -, ce chapitre de l'histoire allemande constitua cependant pour Jarnach une épreuve douloureuse. Lui qui avait obtenu la nationalité allemande en 1931 passa toute la période du nazisme dans ce que l'on a appelé l'émigration intérieure. Il put certes continuer à enseigner la composition - Bernd Aloïs Zimmermann et Jürg Baur comptèrent à cette époque parmi ses élèves - mais ses oeuvres furent de moins en moins exécutées et lui-même fut contraint de renoncer à toutes ses fonctions honorifiques.
À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, Jarnach joua un rôle décisif dans la reconstruction de la vie musicale allemande. En 1950, il devint, à Hambourg, le directeur de la Hochschule für Musik nouvellement fondée. Dans le but de rattraper le niveau artistique international, il s'attacha tout particulièrement à encourager de jeunes talents. Il organisa des cours d'été et fonda également le concours des écoles supérieures de musique allemandes. Mais trop nombreuses furent ses activités pour qu'en soit dressée ici une liste exhaustive. En raison de cet engagement qui lui coûta beaucoup de temps et d'énergie, peu d'œuvres naquirent encore sous sa plume. Le quatuor «Musik zum Gedächtnis der Einsamen», composé en 1952, est l'une d'entre elles. Wilhelm Hecker un élève de Jarnach, note fort justement à son propos: «C'est en ecrivant cette œuvre plus qu'en achevant Faust, l'opéra de son ami disparu, que Jarnach [...] se fait l'héritier de Busoni», ce grand musicien - qui fut tout à la fois penseur, artiste, et professeur.
Bien que, dans les année 50, Jarnach reçût de nombreuse distinctions et fût honoré au cours de maintes cérémonies publiques - en 1959, il fut par exemple décoré de l'ordre du mérite de la République fédérale d'Allemagne -, le sérialisme qui dominait alors finit par bannir ses compositions de la vie musicale. Depuis le début des années 90 se dessine en revanche un renouveau d'intérêt pour ce compositeur d'origine espagnole, qui passa sa jeunesse en France trouva son style personnel en Suisse, concourut à la percée de la musique moderne en Allemagne, marqua celle-ci de son empreinte en composant quelques oeuvres essentielles, et finit malgré tout par tomber dans l'oubli.

Dès avant sa rencontre avec Busoni, Jarnach avait connu le succès en tant que compositeur aussi bien en France qu'en Allemagne. Ses racines artistiques plongent dans la musique fin de siècle française, qui laissa sur son langage musical une empreinte plus durablé qu'on ne l'a admis jusqu'ici.
Plus de trente années séparent la naissance de «Ville morte», la prémière oeuvre de Jarnach à avoir été imprimée, en 1911, du «Journal d'Amrum» qui date de 1941/42. L'Elegle de cette page pour piano rappelle cependant de différentes manières les visions de fin du monde de «Ville morte», qui se détachent maintenant sur un arrière-plan réel, celui de la Deuxième Guerre mondiale. Ces deux ceuvres marquent les points de départ et d'arrivée de notre parcours chronologique à travers la production de Jarnach, dont nous offrons un choix représentatif. De la confrontation de ces deux œuvres se dégage, même si les procédés stylistiques de Jarnach ont pu par ailleurs évoluer, une impression d'étonnante continuité, caractéristique de sa musique.

Jarnach emprunte les textes de ses deux
lieder «Ville morte» et «Arpège» [Drei frühe französische Lieder], écrits au plus tard en 1911, au symboliste français Albert Samain dont la poésie était très prisée en France aux alentours de 1900. [...] «Ville morte» de Jarnach reflète d'une part des visions apocalyptiques semblables à celles qui hantent nombre d'œuvres littéraires et picturales de ce tournant du siècle et qui traduisent la sensibilité d'une époque finissante.
D'autre part, ce lied rend manifeste l'enracinement de Jarnach dans une tradition typiquement française, dans ce style influencé par Liszt, Wagner et Debussy, dont on retrouve aussi maintes caractéristiques dans des lieder de Lili Boulanger composés à la même époque. SU

La
Sonatine pour flûte et piano op. 12, achevée en octobre 1919, figure parmi les oeuvres de Jarnach encore bien connues aujourd'hui. Des brouillons nous renseignent sur le projet initial du musicien: il avait l'intension d'écrire une oeuvre d'au moins deux mouvements et d'y intégrer des éléments d'un lied composé peu de temps auparavant sur un poème tiré du «Cor merveilleux de l'enfant» (op. 15 no. 2). Mais cette unique composition de Jarnach pour flûte traversière et piano ne compte finalement qu'un mouvement. Cette Sonatine publiée en 1920 par l'éditeur berlinois Lienau fut probablement créée la même année par Jean Nada et le pianiste Walter Frey. Elle est dédiée au Zurichois Albert Biolley, pour qui Busoni avait lui aussi écrit sa «Page d'album» pour flûte et piano en mi mineur.
Dans la Sonatine se reflète cette recherche intensive de maîtrise de la forme à laquelle se livrait Jarnach, sans pour autant suivre de manière dogmatique des modèles hérités de la tradition. Dans une brève description de son oeuvre, Jarnach insistait sur le fait que, «sous une apparence de liberté, la Sonatine respectait scrupuleusemerfla forme sonate. Mais ce principe formel se trouve dissimulé de par l'introduction de récitatifs ( m. 23-36 et m. 170-175) et parce que Jarnach a eu la surprenante idée d'exposer le thème secondaire (m. 83-118) à l'intérieur du développement (m. 37-82 et m. 119-169). Cette forme sonate se laisse aisément repérer à la lecture de la partition, mais, à l'écoute, il peut être plus difficile de la percevoir. L'impression produite est plutôt celle d'une composition finement structurée, qui présente néanmoins une parfaite cohérence, celle-ci étant le résultat d'un travail très serré sur le matériau thématique et mélodique. On constate donc ici que Jarnach, tout à fait dans l'esprit du nouveau classicisme de Busoni, a recouru à une forme traditionnelle, mais qu'il a su aussi la faire évoluer - ce qui constitue un principe paradigmatique pour l'ensemble de son ceuvre. Le traitement de la flûte traversière dans cette œuvre d'une extrême délicatesse correspond aux possibilités techniques de la flûte de Boehm, aussi couramment utilisée à cette époque que de ne jours, ainsi qu'aux conceptions esthétiques et à l'univers sonore tels qu'on les trouve exprimés dans la littérature française pour flûte notamment, écrite après le «Syrinx» pour flûte seule de Debussy. La partie de piano, qui se caractérise par son écriture polyphonique et sa limpidité, gagne en coloration grâce à des indications de pédale très nuancées, la voix de flûte quant à elle, qui se déroule linéairement, évite toujours de donner une apparence d'écriture à deux voix et s'attache à maintenir son indépendance au sein de la composition. Dans cette transparence ainsi obtenue se manifeste une esthétique dont le jeu pianistique de Jarnach, tout de clarté et d'élégance, porte lui aussi la marque. SU

En 1925, Jarnach remania en profondeur les lieder réunis sous l'opus 7, qu'il avait composés entre 1913 et 1915 - et c'est dans cette version corrigée que nous les proposons ici. Dans ces Vier
Lieder op.7, on perçoit encore des échos de l'harmonique wagnérienne, notamment dans les deux premiers. En revanche, l'univers sonore de Jasmin (no. 3) s'inspire nettement des modèles français et contraste vivement avec le pathos du lied précédent écrit sur un texte de Hölderlin. S'opposant aux trois poèmes d'amour auxquels il succede, le dernier lied dû cycle, Das mitleidige Mädel, est l'un des très rares exemples d'œuvre umoristique dans la production dé Jarnach. S'il nous semble aujourd'hui qu'un certain comique involontaire se dégage de ce poème, l'adaptation musicale de Jarnach n'en est pas moins une conclusion tout à fait spirituelle de cet opus 7 qui parvient à allier de façon remarquable des éléments stylistiques français et allemands, caractéristiques de ce tournant de siècle. SU

Jarnach fut l'un des premiers compositeurs à s'intéresser au genre de la sonate pour violon seul auquel, vers 1900, Reger avait redonné vie.
C'est ainsi que dès 1913 les deux Sonates pour violon seul op.8 et op. 11 voyaiennt le jour, la seconde «très respectueusement dédiée à Max Reger». Qu'Amalie, la première épouse dé Jarnach, ait été violoniste - la
Sonate op.13 lui est d'ailleur dédicacée - peut bien sûr avoir favorisé l'intérêt de Jarnach pour ce genre instrumental, alors que lui même ne pratiquait pas le violon. Et c'est précisément dans les années 20, où le goût de l'expérimentation était fort développé, que maints compositeurs eurent envie d'écrire pour ce genre, attirés par l'absence de dimension harmonique et par la réduction imposée de son univers sonore. Avec son opus 13, Jarnach va, en 1922, clore magnifiquement la série de ses sonates pour violon seul. Dans cette oeuvre resserrée, à trois mouvements, il réussit de façon originale à créer de subtils équilibres entre l'abstraction monodique et la richesse des associations harmoniques, entre le recours à une polyphonie baroquisante, qui n'est pas sans rappeler Bach, et des aspects contemporains qui portent la marque d'un style aphoristique et grotesque. Les trois mouvements apparaissent comme extrêmement dissemblables, opposés même, le Premier constituant peut-être, comme l'indique Stefan Weiss, la page la plus parfaite que Jarnach 'ait pu écrire à partir de la conception du nouveau classicisme proposée par Busoni. À la différence de ce mouvement extrêmement expansif, le deuxième mouvement, qui adopte l'allure d'un scherzo; présente dans ses parties extrêmes des traits grotesques et caricaturaux, alors que le trio qu'elles encadrent, très mélodieux, avance d'un pas ample et paisible. Les passages empruntés à la littérature romantique virtuose apparaissent ici dans une sorte de miroir harmonique déformant. Un peu à la manière de fantômes, ils se dissipent, à la fin du mouvement, en quelques accords sur la fondamentale la, qui assure latransition avec le troisième mouvement en devenant la dominante de sa tonalité en ré mineur. Avec ses brusques changements d'atmosphère et avec ses oppositions entre des séquences polyphoniques qui donnent une impression de fragmentation et des passages où le musicien opte pour une écriture accordique ou déroule une pure llgne mélodique, le mouvement final révèle un enjouement et un humour insoupçonnés chez Jarnach, de nouvelles facettes donc de son langage musical qui, dans le Berlin des années 20, eut recours à une harmonique de plus en plus grinçante. SU

Les
Fünf Gesänge op. 15 composés entre 1918 et 1922 marquent l'apogée de l'oeuvre vocale de Jarnach, et leur désignation par le terme de "chant" indique en outre un changement d'esthétique par rapport aux lieder précédents. Si les différents chants, tant sur le plan littéraire que musical, apparaissent comme extrêmement contrastés, Jarnach les fait pourtant se succéder de manière à conférer un sens à cette hétérogénéité et à lui imprimer un ordre dont les sombres poèmes de Rilke dessinent le cadre. Chacun à leur manière, les trois textes centraux traitent de l'amour, mais il n'y a que le no. 3 «Rückkehr» (George) qui évoque un accomplissement amoureux. «Rückkehr» est aussi le seul des «Fünf Gesänge» à s'achèver par une conclusion en majeur. Tandis que l'on peut sans difficulté appliquer le qualificatif de "Lied" aux «Gesänge» no. 2 et 3, les deux textes de Rilke adoptent quant à eux un caractère de ballade que vient encore accentuer l'adaptation musicale de Jarnach, extrêmement dramatique et portée par une partie de piano d'une puissante écriture accordique. Dans ces compositions sur des textes de Rilke domine une atmosphère sonore archaïque qui, dans le «Lied vom Meer», crée une impression de permanence et l'intemporalité en faisant se succéder, sur des accords à peine modifiés, des points d'orgue nettement marqués. Dans la pièce «Aus einer Sturmnacht», Jarnach traduit les métaphores cauchemardesques qui expriment l'éphémérité du monde en des séquences baroquisantes, hérissées de dissonances, d'où surgit comme le souvenir fantomatique d'une ouverture française du XVIIe siècle. C'est une toute autre direction qu'indique «Der wunde Ritter», dont l'adaptationmusicale de Jarnach est d'une splendeur égale à celle du poème de Heine qui l'inspire. Ce "chant" semble esquisser le modèle même du "song, auquel Kurt Weill, un élève de Jarnach, assurera quelques années plus tard une réputation mondiale et qui se caractérise par une déclamation sobre et pourtant prenante, soutenue par une ligne de basse se déroulant sans changement rythmique. Jarnach lui confère ici une grande transparence sonore, recourant pour les voix intermédiaires et supérieures à une écriture polyphonique très élaborée. SU

La
Sarabande, que Jarnach composa en 1924 quelques mois avant la mort de Busoni et qui fut publiée comme la deuxième des «Drei Kiavierstücke» op. 17, constitue une sorte de pendant instrumental au dernier des «Fünf Gesänge». Les titres de «Ballabile, Sarabande et Burtesque» que portent les trois morceaux pour piano suggèrent l'existence d'une parenté avec des danses traditionnelles et traduisent aussi sans doute le fait que Jarnach souhaitait se démarquer des danses inspirées par le jazz qui étaient à la mode dans les années 20. Dans le cas de «Sarabande», l'on a effectivement affaire à la stylisationion d'une danse originelle. Créant une tension extrêmement forte tant sur le plan rythmique que sur le plan harmonique, Jarnach transforme celle-ci en une œuvre de vastes proportions qui atteint parfois à une expansion sonore véritablement extatique. Jarnach transcende ici les réalisations, dans les domaines de la composition et de la technique pianistique, de Busoni, l'ami et le mentor auquel toute sa vie durant il voua une profonde admiration. La disparition prochaine de celui-ci semble d'ailleurs être présagée par le caractère sombre, sérieux et impénétrable de la «Sarabande». De ce point de vue, cette composition où, après de dramatiques éruptions, la musique finit, dans un pianissimo, par retomber lentement sur elle-même, peut être considérée comme le "Tombeau de Busoni" et, dans la littérature pour piano, comme une étape importante entre la «Toccata» de Busoni et «Vingt regards» de Messiaen. SU

Moins ténéreuse que celle de la «Sarabande» est l'impression qui se dégage de
Amrumer Tagebuch, mais son «Elegie» - deux fois plus longue que les mouvements «Hymnus» et Sturmreigen qui l'encadrent - est néammoins un chant de lamentations dont l'importance est fondamentale, pour l'interprétation généraie du cycle. Ces trois pièces n'ont rien d'une musique à programme: Amrum est une lie de la mer du Nord que Jarnach et sa seconde épouse Elisabeth, la dédicataire de cet op.30, visitèrent en 1939 au cours de leur voyage de noces. Mais elle apparaît ici plutôt comme le symbole d'un isolement volontairement choisi en cette époque de terreur et de destruction par rapport à laquelle Jarnach, naturalisé Allemand, adopta une attitude de résignation et de distance. Si «Elegie», sur le plan harmonique et de par son atmosphère, présente des similitudes avec le langage musical de «Ville morte» - cette vision apocalyptique d'avant le début de la Première Guerre mondiale -, le troisième mouvement, «Sturmreigen», n'est pas sans rappeler le titre du cinquième chant de l'opus 15, «Aus einer Sturmnacht». À la différence de ce chant, «Sturmreigen» expire dans un pianissimo. Cette œuvre très personnelle de Jarnach s'achève ainsi sur une brève plainte (un intervalle de seconde descendant do-si), symbole d'un sentiment de tristesse et d'impuissance éprouvé face à la cruauté des circonstances.