LUIGIA GABRIELLI VILLENEUVE
Selon la tradition, Louise Villeneuve, créatrice du rôle de Dorabella, était la sœur de la Ferrarese. Cela reste à prouver. Quoi qu'il en soit, la tradition en question remonte à Carl Ferdinand Pohl (1819-1887), le biographe de Haydn, qui ajoute: «Une des plus grandes beautés de l'époque». Elle débuta à Vienne le 27 juin 1789 dans «L'Arbore di Diana», et le journal Wiener Zeitung vanta «son charme, son jeu expressif et la beauté et la profondeur de son chant». En août et octobre, afin de tester ses capacités, Mozart écrivit pour elle trois airs d'insertion: «Alma grande e nobil core» (K. 578), pour «I due Baroni di Rocca Azzara» de Cimarosa, puis «Chi sà, chi sà, qual sia» (K. 582) et «Vado, ma dove?» (K. 583), pour «Il Burbero di buon core» de Martin y Soler (ce dernier ouvrage sur un livret de Da Ponte). Curieusement, on ne trouve dans le K. 577, écrit pour la Ferrarese, ni l'agilité ni la virtuosité des futurs airs de Fiordiligi, et l'air isolé ressemblant le plus à «Come scoglio» est le K. 583, écrit pour Louise Villeneuve. C'est qu'en fait, la musique de Mozart était davantage déterminée par la situation dramatique que par l'interprète. De la carrière ultérieure de Louise Villeneuve, on ignore à peu près tout, alors qu'on sait que la Ferrarese, après avoir quitté Vienne avec Da Ponte en juin 1791, devait y revenir en 1793, et participer en 1797 à la première de «Così» à Trieste. Sa trace se perd en 1799, année où elle retrouva Da Ponte à Venise.
Marc VIGNAL, «Sources, composition et créateurs», in «Così fan tutte», Avant-Scène Opéra, mai-juin 1990, nº 131-132, pp. 12-13.