I Lieder di Christian Sinding

[dal booklet NAXOS "Christian SINDING, Songs", 1999, pp. 6-8]

Il est évident que très tôt, Sinding entretint un rapport privilégié au texte comme moyen d'expression artistique, d'où les 250 mélodies composées durant toute sa carrière. "Alte Weisen", op. 1 six mélodies sur des textes de la collection de Gottfried Keller (1819-90) du même titre, appartiennent aux premières mélodies encore existantes de Sinding. De même datent de cette époque "Lieder und Gesange", op 11 sur des textes de Gottfried Keller, Robert Hamerling (1830-89) et Heinrich Heine (1797-1856), ainsi que les Lieder de "Des Knaben Wunderhorn", op. 15. Les toutes premières tentatives de composition de Sinding pour ce genre, travaux qu'il détruisit plus tard, utilisaient des textes qui, dans une large mesure, accentuaient l'exotique et le dramatique, telle que "Sulamiths sang", extrait du Cantique de Salomon, ainsi que deux mélodies sur des textes de Antar et Abla. Cependant la plus ancienne des mélodies qu'il nous reste utilise des textes ou chants du folklore allemand. L'une des mélodies de l'opus 15, "Maria Gnadenmutter" a été utlisée, par ailleurs, sous une forme fortement révisée, dans le "Livre de cantiques" de l'église norvégienne comme mélodie pour O.T. Moe's "Jesus det eneste" (Jesus, le seul). C'est l'un des hymnes les plus expressifs en Norvège de nos jours.
Sinding ne tarda cependant pas à se tourner vers les poètes norvégiens et danois contemporains, faisant son choix parmi des vers souvent inspirés de la nature, tels que les Mélodies de l'opus 18, les Mélodies sur des textes de Vilhelm Krag (1871-1933), celles de l'opus 19 sur des textes d'Holger Drachmann et Sven Trost, celles de l'opus 36 intitulé "Fra Vaur til Host" (Du printemps à l'automne) et celles sur des poèmes de Nils Collett Vogt (1864-1937). Toutes datent du début des armées 1890. Il avait auparavant composé à plusieurs occasions sur des poèmes de Holger Drachmann (1846-1908), pour ses opp. 4, 8 et 13. La poésie de Drachmann a survecu grâce à l'intérêt que des compositeurs comme Sinding et Grieg lui ont montré.
Les choix de textes Sinding s'étendent donc des romantiques allemands jusqu'aux poètes norvégiens modernes des années de l'entre-deux-guerres, tels Arnulf Overland (1889-1968) (op. 128) et Hermann Wildenvey (1886-1959) (op. 90). Malgré la grande variété des vers, le langage musical de Sinding reste étonnamment stable et, contrairement à beaucoup de ses contemporains norvégiens, la musique folklorique norvégienne ne devint jamais une grande source d'inspiration. Même si, pour quelques pièces sur des textes norvégiens, comme "Vaurdogen" (Jour de printemps), op. 75, on peut trouver une mélodie à connotation folklorique, il s'agit plutôt d'une tentative de créer une atmosphère générale de foklore, plutôt qu'une transformation artistique d'un idéal folklorique. De même, le vocabulaire musical de Sinding a montré relativement peu de développement avec le temps. Il trouva son style personnel de bonne heure et en maintint les caractéristiques principales presque sans prendre en compte l'époque ou le contexte. Profondément et solidement ancré dans le romantisme allemand tardif, son style harmonique, considéré plutôt comme radical à la fin du dix-neuvième siècle, le plaça plutôt rapidement chez les conservateurs du monde musical. Les œuvres lyriques de Sinding sont souvent considérées comme des mélodies de style folklorique facile à chanter, comme beaucoup de celles de l'opus 50, bien que quelques-unes, particulièrement les premières, aient une tendance à un style plus libre, plus déclamatoire. Ses lignes mélodiques sont presque toujours diatoniques, en dépit d'un style harmonique comprenant des chromatismes d'un romantisme tardif. De manière générale, le piano a purement un rôle d'accompagnement, et n'a qu'exceptionnellement son indépendance par rapport à la voix. A l'image de bon nombres de ses œuvres pour la voix, comme celles figurant sur ce disque, la partie de piano soutient la mélodie ou simplement double la voix, comme dans "Pinselilje", op, 90, nº 3 (Narcisse). Sinding utilise parfois une figure ostinato au piano comme élément formel de renforcement.
Dans une lettre de 1899 à son biographe Henry T. Finck, Grieg écrivait que parmi les jeunes compositeurs norvégiens de "romanser" (équivalent norvégien de Lieder ou Mélodies), il tenait Sinding en grande admiration: "On le considère comme étant trop wagnénen," écrit Grieg, "mais c'est faux. Même dans ses "romanser", il est tout simplement lui-même". Le spécialiste norvégien de Sinding, Gunnar Rugstad déclare que les modèles des mélodies de Sinding se trouvent dans les Lieder de Franz Liszt et comme entre autres, sa tendance à construire des mélodies par "changements de vitesse" tonaux, produisant un effet de dégradé qui est un trait commun frappant. Néanmoins, quels que soient les modèles, l'œuvre vocale de Sinding comprend un large éventail de compositions qui continuent à embellir les programmes. Elles naquirent de l'imagination du meilleur compositeur norvégien de mélodies et de "romanser" qui soit.